Votre
vœu enfin se réalise, vous voici réunis anciens
élèves, surveillants ou professeurs du Collège
du Mansourah. Il y a des absents, mais se retrouver près de
100 après 28 ans de séparation, c’est déjà
une performance qui montre l’attachement profond que vous avez
gardé à ce collège.
Le Docteur Chaouche Teyara Abdelouhab va vous faire le bilan de ce
qui a été fait pour préparer cette assemblée,
vous avez entre les mains le compte-rendu de la réunion du
11 décembre dernier ainsi que l’allocution que j’ai
prononcée ce jour-là, je vais la reprendre en partie,
si vous le voulez bien, car mon rôle ici est de donner un esprit
à nos rencontres afin qu’elles ne se bornent pas à
de banales retrouvailles entre copains, mais qu’elles soient
des réunions de gens décidés à s’entraider
pour vivre un certain idéal afin de le transmettre aux autres
et d’influencer ainsi toute la société.
Vous m’avez tous fait remarquer combien le collège vous
avait marqués. Jetés dans la vie civile où règne
trop souvent l’égoïsme, le mercantilisme et l’arrivisme,
vous vous êtes sentis isolés. On se moquait de vous parce
qu’on voyait de suite par votre conduite que vous étiez
l’enfant des pères. Vous étiez fiers de l’éducation
que vous aviez reçue, mais il vous fallait lutter à
contre-courant pour faire valoir vos idées et surtout les transmettre
à vos enfants. La fraternité d’une journée
comme celle d’aujourd’hui est faite pour vous y aider.
Mais quel est donc cet Esprit du Mansourah qui vous a tant marqués
et qui a fait que vous n’êtes pas tout à fait comme
les autres ? Le Dr Chaouche Teyara et moi-même, nous nous sommes
mis un jour à la tâche pour essayer d’en définir
les points essentiels. Mais remarquons tout d’abord que cet
esprit n’est pas propre au Mansourah, il s’agit en fait
de valeurs universelles qui appartiennent à la nature humaine
vue sous l’angle du bien et que vos éducateurs vous ont
fait vivre au collège.
La nature humaine a été créée par Dieu,
ces valeurs ont donc une origine divine et toutes les religions dignes
de ce nom les ont adoptées : islam, christianisme, bouddhisme…
Précisons maintenant quels en sont les points forts :
• d’abord la foi en Dieu - et vous remarquerez que je
n’avais pas mentionné ce point le 11 décembre
mais que j’ai pensé essentiel de l’ajouter aujourd’hui,
• puis en premier lieu, comme vertu, la droiture en toutes choses,
ce qui implique la fuite du mensonge qui gangrène les relations
dans la société ambiante,
• et l’honnêteté dans le travail et la vie
courante,
• et le sens de l’effort, du travail personnel,
• la conscience professionnelle qui découle d’un
travail conçu comme un service rendu aux autres et non comme
un simple moyen de s’enrichir aux dépens des plus faibles,
• le respect de toute personne humaine en particulier de la
femme, car beaucoup m’ont dit combien leur façon de considérer
les relations garçon-fille était différente de
celle de votre entourage,
• d’où une notion de la famille comme cellule d’amour
, d’éducation, d’entraide et de service,
• d’où l’esprit de tolérance vis à
vis de ceux qui nous sont différents par la culture, la religion
ou tout autre aspect physique ou moral,
• enfin l’ouverture à une culture universelle,
base de tout dialogue avec ceux que nous rencontrons.
Ces contours une fois définis, il nous reste à mettre
cet esprit en pratique et voir comment le répandre autour de
nous, or c’est ce qui est le plus difficile. En dehors de notre
entraide mutuelle, je vois trois directions pouvant orienter notre
activité : le social, le culturel et l’éducatif
:
• le social peut comporter l’aide aux plus défavorisés
ou des bourses à des jeunes méritants,
• le culturel devrait s’intéresser à l’histoire
de la région, envisager des sorties en groupe et des conférences,-
• l’éducatif aurait comme but le lancement d’une
école privée à but non lucratif pour transmettre
notre idéal à nos petits enfants, à défaut
de n’avoir pu le faire pour nos enfants.
Toutes
ces entreprises sont mangeuses de temps, mais je vous demande d’y
mettre du vôtre, car un amour vécu qui ne cherche pas
à se répandre n’est pas un véritable amour.
Vous avez eu tort, semble-t-il, de me faire confiance, car vous étiez
peut-être venu vivre simplement un bon moment entre copains
et voici que je vous lance sur les routes pour faire quelque chose
de plus grand. Mais c’est en se donnant qu’on devient
plus homme et je veux que vous soyez un peu comme moi. Alors je saurai
vraiment que notre action d’autrefois a porté du fruit.
Je fais partie de la génération passée, je dois
transmettre le flambeau, à vous de le reprendre. Si je peux
vous être utile, vous savez que je le ferai, mais c’est
sur vos propres forces qu’il faut compter. Il faut avoir confiance,
notre action est bonne, Dieu nous aidera à la réaliser,
j’ai une intuition qui ne trompe pas : notre action est bénie
de Dieu et il s’en réjoui. Mais il ne fera pas le travail
à votre place.
Pendant 28 ans nous avons rongé notre frein et espéré
des jours meilleurs. Le moment est venu de se mettre à l’œuvre,
il n’est jamais trop tard pour bien faire. Vous serez mes héritiers
si vous réalisez un peu de ce que je vous ai dit. Je vous souhaite
de réussir.
Constantine,
le Samedi 19 juin 2004
Paul Marioge
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